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5 avril 2006 3 05 /04 /avril /2006 13:21
18/03/2005 11:56:01 - Publié par webmaster  

Histoire précoloniale et début de la colonisation    1 Histoire précoloniale


On sait peu de choses sur l’histoire de ces régions, même si les travaux des archéologues permettent d’affirmer qu’elles ont fait l’objet d’un peuplement très ancien. Bayle des Hermens, 1975, a trouvé dans le sud-est du pays des galets de l’époque préacheuléenne. Dans le nord-est, il existe des peintures rupestres. Quant aux recherches de Pierre Vidal, 1969, elles ont montré l’existence d’une civilisation mégalithique à Bouar dans l’ouest du pays. Les siècles qui suivirent demeurent obscurs et peut-être quelques travaux en linguistique comparative pourraient-ils contribuer à les éclaircir.

Pour nous renseigner sur une époque plus récente, nous avons quelques témoignages sur la traite esclavagiste. Selon P. Kalck (1974: 84) "Brazza et Monseigneur Augouard rencontreront encore à la fin du XIXe siècle de longs convois de pirogues chargés d’esclaves". Quelques lignes plus loin, l’historien fait remarquer: "Les linguistes notent l’apport de mots portugais que l’on retrouve dans les langues véhiculaires et notamment dans la langue d’eau devenue l’actuel sango."

Et il conclut ainsi (1974: 85) ce chapitre consacré à la période xvie-xviiie siècle: "En ce qui concerne l’histoire centrafricaine, il convient de retenir que le pays centrafricain était durement touché dès la fin du XVIIIe par les deux grandes traites orientale et occidentale."

L’histoire de l’esclavage à l’est semble la plus connue et les razzias de Sénoussi demeurent encore célèbres.



2. Le cadre historique de la colonisation



Situé au cœur du continent, le territoire qui est devenu la République Centrafricaine a été longtemps, pour reprendre l’expression de P. Kalck, "la dernière tache blanche qui subsistait sur les cartes de l’Afrique aux environs de 1885" (1976:127).



Devant ce vide, l’imagination occidentale a pu dériver de la manière la plus folle. À ce sujet, nous pouvons citer, non seulement la fiction présentée par J. Verne dans Cinq semaines en ballon mais aussi l’imposture scientifique des hommes à queue dont l’ouvrage de J.-D. Pénel, Homo caudatus , 1982, démonte les rouages.



L’histoire écrite commence avec l’arrivée des explorateurs européens: Schweinfurth, auteur de Im Herz von Afrika, voyagea aux confins du Soudan vers 1870; Junker, quelques années plus tard, pénétra en pays zandé mais l’insurrection mahdiste devait rendre difficile l’arrivée des explorateurs par l’est.



L’exploration et la conquête se firent par le sud, en remontant l’Oubangui et ses affluents. C’est pour des raisons géostratégiques que les Européens furent obligés de traverser ce vaste territoire. En effet, ils cherchaient à atteindre le Nil par la voie de l’Oubangui: Vangèle (1886-1890) pour le compte des Belges, Marchand (1897-98) pour celui des Français. Entre 1892 et 1900, quatre missions eurent pour but le lac Tchad (Brazza par la Sangha, Crampel, Maistre et Gentil à partir du coude de l’Oubangui). De ces tentatives de relier l’Oubangui au Chari, il nous reste quelques récits qui peuvent nous renseigner sur l’état du pays au moment de la conquête.



Parler de pays, au sens de nation, serait tout à fait inexact à cette époque. Comme le remarque C. Prioul (1982: 29): "Vers 1890, le seuil Oubangui-Chari est occupé par des ethnies riverainnes dont les domaines sont bien circonscrits dans l’espace et dont les us et coutumes diffèrent sensiblement."



Les contours actuels du territoire centrafricain ne furent fixés que progressivement en raison de l’âpre lutte que se livraient les puissances coloniales dans cette zone. On sait que le roi Léopold II de Belgique alla jusqu’à présenter de fausses cartes de la région! Cette situation est parfaitement résumée par Y. Boulvert (1986a: 91): "La frontière méridionale avec le Zaïre, sur le thalweg de l’Oubangui résulte de la rivalité avec les agents de l’État Indépendant du Congo" (1894). Celle, orientale, avec le Soudan est une conséquence de la crise de Fachoda avec la Grande-Bretagne en 1899 mais elle ne fut délimitée qu’en 1923! La frontière avec le Kamerun allemand fut, sur une profondeur atteignant 300 km, déplacée quatre fois entre 1894 et 1920. Quant aux frontières avec le Tchad et le Congo, il ne s’agissait, du temps de l’Afrique Équatoriale Française, que de limites administratives pouvant être modifiées par simple décret."



En 1897, fut créé par la France le territoire de l’Oubangui-Chari et d’octobre 1901 à janvier 1910 furent pris une série de décrets instituant l’Afrique Équatoriale Française dont le Gouverneur Général siégeait à Brazzaville. Cependant, à la même époque, le pays fut vendu pour son exploitation aux compagnies concessionnaires qui se livrèrent à un véritable pillage (cf. Coquery-Vidrovitch, 1972). André Gide, dans son Voyage au Congo, publié en 1927, dénonça les exactions de certains de leurs agents. Les populations locales, saignées à blanc, se révoltèrent: la plus célèbre de ces révoltes fut la guerre de kongo-wara (guerre des manches de houes) en pays gbaya, qui dura de 1924 à 1930 environ. La colonisation fut vécue comme un véritable traumatisme par les habitants de cette région qui, outre le travail forcé et le portage, eurent à subir les déplacements de populations, la réquisition des hommes pour la construction du chemin de fer Congo-Océan sans compter l’impôt et l’enrôlement "volontaire" lors des deux dernières guerres mondiales.



La "mission civilisatrice" de la France fut longtemps réduite à l’implantation de postes administratifs, au tracé de quelques routes (surtout à partir de 1920 grâce aux efforts du Gouverneur Lamblin et… des indigènes). On lui doit aussi la propagation du christianisme sous l’égide de Monseigneur Augouard. Faisant le bilan de ces années, l’historien P. Kalck considère l’Oubangui-Chari comme "la plus délaissée des colonies" (1976: 221). D’ailleurs, les chiffres de la population européenne au début de la colonisation confirment bien que le pays était sous-administré: l’Oubangui comptait en 1906 148 Européens et assimilés, 348 en 1911, 261 en 1921 et 327 en 1926. Quant à la population indigène, le recensement de 1926 donnait le chiffre de 1066444 habitants mais l’administrateur Bruel faisait remarquer qu’il existait une étendue déserte d’environ 170 000 km2 le long de la frontière du Soudan anglo-égyptien: "C’est dans l’ancien Dar Fertit (pays des esclaves) où depuis des siècles sans doute, on est venu chasser l’esclave de bien des coins de l’horizon. Les Ouadaïens, les Foriens, les Nubiens, les Égyptiens y faisaient encore, il y a 50 ans, des incursions annuelles.[…] (Ces régions) de mémoire d’hommes, étaient peuplées il y a 40 à 50 ans; des traces de villages subsistent et des témoins." (Bruel cité par Boulvert 1986 b: 25).



Pillée par les razzias esclavagistes, meurtrie par la colonisation, la population centrafricaine est encore en majorité rurale.

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