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21 octobre 2006 6 21 /10 /octobre /2006 17:58
64ème réunion du CPS de l`UA - Les grands enseignements du sommet d`Addis-Abeba / Le vernis écaillé de Sassou
(Le Matin d'Abidjan 20/10/2006)


Realpolitik: La 64ème réunion du Conseil de paix et de sécurité de l'UA a livré son communiqué final. Après une longue journée d'affrontements entre partisans de la démocratie et putschistes à la solde de la françafrique. Tous les lobbies sont sollicités. De part et d'autre. A l'arrivée, le camp présidentiel a perdu un grand soutien. L'Afrique du Sud de Thabo Mbeki s'est déchargée de la médiation. Sassou le remplace. Le RHDP et la France jubilent. Wade, Tanja, Bongo et autres également. Le communiqué mentionne des pouvoirs élargis pour Banny, le joker de la françafrique. On parle de décrets-lois pris en Conseil des ministres. De l'autorité nécessaire pour nommer sur les FDS. Et quoi d'autre ! Chacun a son communiqué qui l'arrange. Six versions circulent. Mais une seule subsistera. Celle consensuelle dont la lecture irrite les acteurs du tout sauf Gbagbo. Djédjé Mady pleure au nom du RHDP. Il a bien compris. La constitution ivoirienne reste en vigueur. Banny n'a pas les pouvoirs de l'exécutif. Tous les pouvoirs comme ils le souhaitaient. Kofi Annan râle pour Chirac et lui, les futurs retraités. Soro Guillaume au nom de la rébellion. Le Quai d'Orsay tente pour sa part d'intoxiquer l'opinion. En interprétant en sa faveur le texte final. Un baroud d'honneur. Pour rien. Que de déceptions ! Pendant que Gbagbo et l'Afrique digne restent sereins. Fiers d'avoir préservé les acquis.


64ème réunion du CPS de l`UA - Les grands enseignements du sommet d`Addis-Abeba

Que peut-on retenir de la 64è réunion du Conseil de Paix et de Sécurité de l`Union Africaine ? Beaucoup de choses et rien en même temps. A part les mensonges des médias étrangers qui, comme d`habitude, ont joué à intoxiquer, la réalité des débats et la qualité du lobbying entrepris par l`équipe du président Gbagbo auprès de ses pairs d`Afrique Australe, sont les seuls qui ont consacré le vrai contenu du vrai communiqué final, pondu 17 heures après la fin du sommet. Toute chose qui montre que ceux qui en veulent encore à Gbagbo ont encore du chemin à faire. Retour sur tout ce qui a marqué ce rendez-vous africain.

L`un des premiers enseignements à tirer de cette 64è réunion de l`UA est inévitablement le fossé politique qui se creuse chaque jour davantage entre les chefs d`Etat d`Afrique anglophone et leurs homologues francophones, d`une part et entre les chefs d`Etat des pays d`Afrique Australe et ceux de l`Afrique de l`Ouest, d`autre part.

Dans le fond

Sur le point de vue de l`éducation politique, les leaders des pays comme l`Angola, le Burundi, l`Ouganda, le Soudan, le Rwanda, l`Afrique du Sud, etc., généralement héros des indépendances chez eux, ont beaucoup à apprendre aux suiveurs de Jacques Chirac. Le sommet d`Addis Abeba a montré l`immaturité politique de nombre de chefs d`Etat dits incontournables par rapport au dossier ivoirien. C`est chaque fois que les leaders de l`Afrique digne pouffaient de rire lorsqu`un Sassou, un Wade ou un Bongo ouvraient la bouche pour demander, soit que l`on ne condamne pas la rébellion, soit que Banny signe les ordonnances et autres décrets-lois en Conseil des ministres. Ce, en parfaite ignorance de ce qu`un Conseil des ministres se tient toujours en présence du chef d`Etat qui en est le garant. "Cela ne nous surprend pas, lançait un ministre des Affaires d`Afrique Australe, les Conseils de ministres se tiennent si rarement au Congo que Sassou demeure ignorant de qui les dirige". Les uns ont aussi apprécié le degré de légèreté avec laquelle Wade est sorti de la salle des plénières pour s`envoler pour la Mecque. "Cela montre le peu d`intérêt qu`il a pour la crise ivoirienne qui a pourtant pris en otage l`économie de toute la sous-région" A l`opposé, ce même interlocuteur fait la remarque suivante : "Les dirigeants ouest africains n`ont pas de démarche scientifique. Mbeki a marqué la différence en allant à Abidjan pour s`imprégner de la réalité de la crise ivoirienne. Les dirigeants ouest africains peinent à s`affranchir de la tutelle française. Nous n`accepterons jamais une démarche similaire". De sorte que quand la CEDEAO a fait le forcing pour faire admettre sa recommandation mafieuse d`Abuja comme boussole des travaux, les présidents de l`Afrique digne tels que Kagamé, Yoweri Museveni, Dos Santos, et leur homologue du Botswana ont carrément refusé de venir à Addis Abeba pour cautionner la mascarade. Même l`Afrique du Nord avec Mubarak d`Egypte et Bouteflika d`Algerie, a souscrit à cette idée. Ce qui explique que sur 15 chefs d`Etat, seulement 6 parmis eux aient fait acte de présence. C`était tout dire. Et cela situait sur la crédibilité du complot de la CEDEAO et d`une partie de l`UA contre la Côte d`Ivoire.

Dans la forme

Dans la forme, le fait que le sommet n`ait pu immédiatement produire un communiqué final était la preuve q`un malaise subsistait. En effet, 6 communiqués finaux aussi différents les uns que les autres ont été remis à la presse. 3 pour la version française et 3 autres pour la version Anglaise. Au fur et à mesure que l`on avançait dans le temps, un communiqué final particulier était remis à la presse. Par exemple, lorsque la première mouture anglaise comprenait un point précis sur le retrait du médiateur, la seconde ne le contenait pas. Ou encore, alors que la deuxième en français ne comprenait pas la notion "d`Armée intégrée", la première la contenait. La dernière aussi. Ce flou artistique, ajouté au fait que, débuté mardi à 11h15 mns pour finir vers 23h45 mns, le communiqué final n`a été disponible que le mercredi vers 15h, était la preuve que cette partie de l`Afrique qui entendait magouiller pour noyer Laurent Gbagbo, a été sérieusement contrariée. Mais l`élément essentiel qui a davantage contrarié le complot était l`attitude du président Gbagbo. Désormais entouré par des conseillers très au fait de la chose diplomatique, il a été demandé au président Gbagbo de ne quitter les sommets qu`avec les communiqués finaux. A Abuja, le président Gbagbo a exigé de lire et d`approuver le communiqué final avant de quitter les lieux. Il en est reparti avec deux brouillons et un communiqué final au grand désarroi du comploteur Ibn Chambas dont les services avaient sciemment tout retardé aux fins d`insérer des points confligènes dans ledit communiqué. Mais en vain. A Addis, c`était pareil. Conscient du danger, Gbagbo a informé le siège de l`UA, de ce qu`il ne quitterait pas Addis-Abeba sans le communiqué final. C`était le branle-bas. Après avoir "filé les mauvais sons à RFI" pour intoxiquer le monde entier, les comploteurs de Sassou NGuesso ne savaient plus comment faire admettre des points comme "Tout le pouvoir de l`Exécutif à Banny", "Banny désormais à même de nommer aux emplois civils et militaires", etc. Comment remettre ce genre de points main à main à Gbagbo, qui dès qu`il a reçu une première mouture a saisi Konaré qui l`a à son tour assuré qu`elle n`était en rien la mouture dont le conclave avait fait cas au finish. Conséquence, les services de l`UA, après le one man show de Sassou Nguesso, ne savaient plus comment intégrer dans le communiqué à donner à Gbagbo les points confligènes relatifs aux pleins pouvoirs de Banny et sa possibilité nouvelle de nommer aux postes militaires et civils. Or c`est justement ce que RFI et ses relais ont laissé croire tout le temps qu`a duré le sommet.

William-Varlet ASIA,
Envoyé spécial à Addis Abeba


Le vernis écaillé de Sassou

Le président de l'Union africaine et nouveau médiateur, depuis quelques heures, dans la crise ivoirienne, en se rendant mardi dernier à Addis-Abeba, n'avait qu'une mission, une seule : celle d'accomplir les desiderata de son mandant français. A savoir dépouiller totalement le Président Laurent Gbagbo de ses prérogatives. Et le moins que l'on puisse dire, c'est que le Congolais a rempli sa mission, du moins, il en a donné l'impression. Cela, le temps d'un huis clos qui aura réuni 6 Chefs d'Etat sur 15 attendus et d'un communiqué final accouché dans la douleur. Un document qui donne l'illusion du pouvoir au Premier ministre Charles Konan Banny. En lui faisant croire sur papier, qu'il aurait désormais tous les pouvoirs de l'exécutif. Illusion car on imagine difficilement comment dans un régime présidentialiste comme celui de la Côte d'Ivoire, alors que la Constitution n'a pas été suspendue, un homme, fût-il président de l'Union africaine, peut, le temps d'un conclave, transférer les pouvoirs d'un président élu, à un premier ministre. Sans être un féru de la démocratie, Sassou Nguesso sait que ce choix est condamné à être inopérant. Mais là n'était visiblement pas sa préoccupation majeure. L'essentiel était d'obtenir un satisfecit de Paris. Et cela n'a pas tardé puisque mercredi dernier, soit au lendemain de la 64ème réunion du Cps de l'Ua, le porte-parole du ministère français des affaires étrangères accueillait " avec intérêt l'appel au renforcement important des pouvoirs du Premier ministre qui pourra décider par ordonnances ou par décrets-lois et qui aura l'autorité nécessaire sur les forces de défense et de sécurité. (…) Nous formons le vœu que la médiation confiée au Président Sassou Nguesso en sa qualité de président de l'Union africaine permette d'aboutir à des élections incontestables avant le 31 octobre 2007 ". Sinon à bien observer et en lisant entre les lignes du communiqué final, Banny n'a obtenu aucun pouvoir qu'il n'en en avait déjà. Les ordonnances et autres décrets-lois ne pouvant être pris qu'en Conseil des ministres, présidé, on le sait par le Président de la République. Autrement dit, si cela doit se faire, ce sera sous l'autorité et seulement avec l'accord de ce dernier. Donc à ce niveau, il n' y a véritablement rien de nouveau sous le soleil. Quant au contrôle des forces de défense et de sécurité, l'idée est davantage utopique car les troupes régulières sont attachées au Président de la République de par la Constitution qui en fait le chef suprême des armées et non à une tierce personne fût-elle un Premier ministre coopté par la communauté internationale. Or, la Constitution est encore en vigueur. En somme Sassou a voulu faire du neuf avec du vieux. Le premier magistrat de Brazzaville, tel un esthéticien, a seulement passé une nouvelle couche fine de vernis sur la Résolution 1633, afin de présenter le dernier sommet d'Addis-Abeba comme celui de la rupture, en ce qui concerne la crise ivoirienne. Malheureusement pour lui, la couche de vernis n'a pas mis longtemps à s'écailler pour laisser apparaître l'équilibrisme si cher à la diplomatie. Qui consiste toujours à ramener les différents protagonistes dos à dos. D'où la grande tristesse de notre confrère burkinabé " Le Pays ", qui enrage en ces termes : " L'UA indique que Banny aura les pleins pouvoirs. Mais de quels pouvoirs s'agit-il ? Quels pouvoirs peut-il exercer concrètement tant que Gbagbo est président et n'entend pas perdre la moindre parcelle de son autorité ? Tout ce qui est décidé aujourd'hui ne constitue aucune avancée par rapport à la Résolution 1633 ". Un état d'esprit que partage bien le Pr Alphonse Djédjé Mady, ci-devant, président de la coalition des partis politiques opposés au Président Laurent Gbagbo, qui, revenu à plus de lucidité après l'euphorie qui s'était emparée mardi nuit des milieux de l'opposition, demande aujourd'hui aux Nations unies de clarifier certaines dispositions des recommandations du Conseil de paix et de sécurité de l'Ua, qui peuvent selon lui, prêter à confusion. Pour le Secrétaire général du Pdci, " l'Onu devrait par exemple souligner que les décisions internationales doivent s'imposer à la Loi nationale, car jusqu'ici, la primauté accordée à la Constitution a nourri les blocages ". De là à penser que le texte de Sassou est un fourre-tout et que les pouvoirs attribués à Banny sont en réalité une coquille vide, il n'y a qu'un pas que les analystes futés et les observateurs avertis franchissent allègrement. Sacré Sassou!
Yves De Sery


POUVOIRS ELARGIS DU PREMIER MINISTRE
Sassou offre une coquille vide à Banny

Au bloc rebelle, les yeux sont désormais rivés vers New York. Bédié, Ouattara et leurs partisans, désabusés par les conclusions du sommet du Conseil de paix et de sécurité de l'UA, s'en remettent à l'ONU. C'est que, après Abuja, Addis-Abeba n'a pu aller au-delà des simples intentions de doter le Premier ministre de pouvoirs extra constitutionnels.

Désillusion ! Le sommet d'Addis-Abeba n'a pas donné les résultats escomptés par Bédié et Ouattara. Passés les moments d'euphorie, Konan Banny et ses soutiens aussi bien locaux qu’internationaux restent pantois. C'est que la réunion censée doter la Primature de pouvoirs forts a accouché d'une souris. Même si depuis la fin de la rencontre du Conseil de paix et de sécurité, l'Elysée et ses réseaux tentent un baroud d'honneur. En effet, la presse française et le Quai d'Orsay s'extasient sur le point 20 du communiqué final qui stipule que: " Le CPS réaffirme son soutien aux forces impartiales (ONUCI et Licorne), et demande le renforcement de leur mandat. " Le maintien sans surprise du GTI et " un rôle plus important " dévolu au Haut représentant chargé des élections, sont autant de maigres acquis qui ne cachent pas l'amertume de la coalition politico-rebelle et ses parrains. De fait, la Constitution sur laquelle depuis longtemps est lancée une OPA n'a pas fait l'objet de débats. Si le bloc rebelle ne se faisait pas d'illusions sur la mise sous éteignoir de la Loi fondamentale, il a plaçait toutefois son espoir dans les prérogatives extra constitutionnelles de Konan Banny. Mais le document et l'issue des discussions n'a pu aller au-delà des intentions. Ainsi, le CPS convient que " le Premier ministre disposera également de l'autorité nécessaire sur toutes les forces de défense et de sécurité ivoiriennes intégrées, pour lui permettre d'exécuter les tâches qui lui sont assignées. " Constat : Konan Banny ne nommera pas aux emplois militaires. La Constitution étant toujours en vigueur, le chef de l'Etat demeure le chef suprême des armées. Et les Forces de défense et de sécurité qui ne cachent pas leur fidélité à la cause républicaine s'accommoderont mal de deux chefs. La tâche de Banny dans ce domaine est d'autant plus ardue, que l'état-major des FDS rechigne à donner sa caution à un ''état-major intégré''. Ce qui implique au préalable le désarmement des rebelles, une éventualité qui fâche Guillaume Soro et les siens. Tout au plus, la hiérarchie militaire des FDS consent-elle à accepter l'intégration dans ses rangs, des militaires déserteurs qui ont rejoint la rébellion. Avec leurs grades initiaux. Et comme pour mettre fin à de probables supputations, le Général Mangou et ses hommes ont tenu à rencontrer hier le chef de l'Etat. Même si rien n'a filtré de la rencontre, il nous est revenu de bonnes sources que la ''Grande muette'' est allée réaffirmer les contours républicains de sa mission guidée qu’elle est par le strict respect de la Constitution qui désigne Laurent Gbagbo comme seul et unique patron de l’exécutif. Le projet de Konan Banny et ses commanditaires qui, depuis des lustres, ont mis à prix les têtes de Mangou et d'autres galonnés, marque ainsi un coup d'arrêt. Ce n'est pas tout. Addis-Abeba n'a pu s'engager à faire de Banny un président de la République bis. Tout au plus, les chefs d'Etat ont-il fait dans le dilatoire. " Dans l'accomplissement de sa mission, le gouvernement peut, en toutes matières, prendre, en conseil des ministres, des décisions par ordonnance ou décrets-lois. En particulier, le gouvernement peut adopter, par ordonnance, des mesures appropriées pratiques, dans l'esprit de la loi, pour accélérer le processus de délivrance des jugements supplétifs et des certificats de nationalité ", a convenu le sommet. Là encore, une froide analyse laisse peu de place à la jubilation dans le camp rebelle. Car le G7 qui réclame des documents d'identité, notamment le certificat de nationalité à tout requérant pendant les audiences foraines, n'a pas été suivi. La résolution de l'UA soulignant le respect de " l'esprit de la loi " dans l'octroi des certificats. Ce qui, du reste, est conforme au guide des audiences foraines, fort combattu par la rébellion et ses alliées houphouétistes. Qui plus est, les conseils des ministres se tiennent sous la présidence du chef de l'Etat. Et comme à l'ordinaire, le Premier ministre fait des propositions d'ordonnance, la signature étant toujours du ressort de Laurent Gbagbo. Il n’y a donc rien de nouveau en Eburnie. On le voit, le salut pour Chirac et ses filleuls n'est pas venu de la capitale éthiopienne. Les obligés de l'Elysée ont ainsi été freinés dans leur ardeur. Ce qui justifie toute la campagne médiatique enclenchée depuis quelques jours, sur la radio publique française, RFI. Objectif, diluer l'échec du 64è conclave du CPS pour le bloc rebelle ivoirien. Mais les partisans de Bédié et Ouattara ne sont pas dupes. Face à l'implacable réalité, le directoire du Rassemblement des houphouétistes ne se voile pas la face, et fait la moue : " Nous souhaitons la clarification de certaines dispositions qui peuvent prêter à confusion ", plaide déjà Djédjé Mady. Soro n'est pas en reste, qui note que " les recommandations de la réunion ne sont pas suffisantes. " Tous lorgnent désormais vers la maison de verre de New York. Après les douches froides d'Abuja et Addis-Abeba, les mouvements politiques et rebelles coalisés s'en remettent maintenant au Conseil de sécurité de l'Onu, qui se réunit dans quelques jours.

Guillaume N'Guettia




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